samedi 9 novembre 2013

Underground, de Haruki Murakami

Le genre : recueil d'entretiens Le sujet : les attentats au gaz sarin perpétrés en 1995 dans le métro de Tokyo par des membres de la secte Aum. Mon avis : excellent, voire indispensable. Murakami dit avoir éprouvé le besoin, quelques mois après les événements, de comprendre ce qui s'était passé mais aussi de comprendre l'âme du Japon contemporain. Et il a le grand art de servir son sujet avec une immense humilité, sans prétendre non plus à une totale subjectivité, mais avec une parfaite intelligence, tout en ayant toujours l'air d'un homme ordinaire. La première partie du livre, consacrée aux victimes, est étonnante : on revit à chaque témoignage, le récit de l'attentat selon des points de vue différents. Ce n'est pourtant jamais répétitif, jamais lassant. Ce qui m'a le plus étonnée, c'est que très peu sont dans la colère. On comprend que les victimes d'un attentat ne sont pas seulement les blessés, loin de là : mais tous ceux qui ont été choqués, voire traumatisés, directement et indirectement. Dans la seconde partie du livre, Murakami est allé à la rencontre de membres de la secte (qui n'est pas dissoute mais a pris un autre nom), certains qui l'ont quittée, d'autres non. Aucun ne cautionne les attentats, aucun n'était au courant, et tous évoquent la forme de bonheur, persistant, qu'ils ont trouvé en rejoignant la secte, au moins au départ, et qu'ils ne trouvaient pas ailleurs, dans la société actuelle. Murakami prouve, par ce livre, que la vision d'un monde manichéen est non seulement erronée, mais très dangereuse. Les attentats de Tokyo sont le signe d'un mal qui ronge la société d'aujourd'hui (et à mon avis, tout pays prétendûment civilisé aujourd'hui, pas seulement le Japon) à cause de ses choix. Notamment celui d'écraser l'individu et son besoin de spiritualité.

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